À la foire musulmane, l'UOIF entend véhiculer "un message de paix"

04/05/2015 23:43

Trois mois après les attentats de "Charlie Hebdo" des milliers de musulmans se pressent dans les allées du Bourget pour la rencontre annuelle des musulmans de France, organisée par l'Union des organisations islamiques de France (UOIF). Dès l’entrée, le visiteur est accueilli par l’odeur de l’encens et un joyeux brouhaha d’enfants qui crient et des chants religieux. Sur les stands se côtoient livres, vêtements, mais aussi pâtisseries et jouets. Le salon des expositions du Bourget accueille du 3 au 6 avril la 32e rencontre annuelle des musulmans de France, la RAMF pour les habitués. Organisé par l’Union des associations islamiques de France (UOIF), qui avec ses 250 associations, fédère un large spectre de l’islam de France, l’événement se veut un moment de rencontre pour la communauté musulmane de l’Hexagone, qui compte environ 5 millions de fidèles. Ils peuvent y assister à des conférences, y suivre des enseignements théologiques, mais aussi déambuler dans les allées du salon commercial et faire des achats qu’ils ne pourraient faire ailleurs. Sans compter des pavillons d'information pour les jeunes et les familles, un village humanitaire, des expositions, un concours de mémorisation du Coran... Si l’UOIF est la branche française des Frères musulmans, l'influence de cet événement sur la première communauté musulmane d'Europe va bien au-delà de la mouvance "frériste". Panser les plaies après les attentats de janvier Le thème choisi cette année, "Mohammed, prophète de miséricorde et de paix ", a une résonnance particulière, trois mois après les attentats jihadistes de janvier. Si l’UOIF assure que cette thématique avait été arrêtée en septembre 2014, Amar Lasfar, président de l’UOIF, reconnaît que l’événement tombe bien. "C’est d’autant plus important de se recentrer sur la figure du prophète cette année. Nous voulons présenter à la société dans laquelle nous vivons qui est notre prophète, notre modèle. On lui attribue trop de choses à tort", explique-t-il à France 24. >> À lire aussi : notre entretien avec Amar Lasfar, président de l'UOIF C’est également ce que pense Aurélie, une jeune femme de 32 ans. "Aujourd’hui, on tue au nom du prophète. Or, c’est un messager de paix ", rappelle-t-elle tristement. Si elle porte un long voile vert aujourd’hui, elle n’a pas toujours été musulmane. "Je suis une convertie", sourit-elle. Depuis les attentats de janvier, elle a senti un changement. "C’est très simple, j’étais en période d’essai et dès qu’on a su que j’étais voilée, on a mis fin à ma période d’essai, c’était juste après 'Charlie Hebdo'", raconte-t-elle amèrement, précisant qu’elle ne porte pas le voile sur son lieu de travail. Un peu plus loin, le visiteur est attiré par une sono hurlante. Des images de la guerre et des destructions en Syrie, diffusées sur écrans géants, forcent à s’arrêter. On est sur le stand d’Ummah Charity, une jeune ONG qui récolte des fonds pour les musulmans en détresse à travers le monde. "On fait des vidéos chocs et on les diffuse sur les réseaux sociaux pour montrer aux gens la réalité de ce qui se passe en Syrie par exemple, et ailleurs", explique Bilal Righi, le président. Pour lui la RAMF permet aux musulmans de se soutenir mais montre aussi à la société les initiatives, les projets, le côté humanitaire. "Après 'Charlie Hebdo' on s’est senti coupables alors qu’on avait rien fait. C'était très dur pour nous. Les premières victimes du terrorisme c’est les musulmans", déplore-t-il. Se retrouver entre musulmans Fati lui, est venu avec son épouse Sabrina et leurs deux petits garçons. "On vient chaque année au Bourget, c’est important. C’est devenu un rituel ", raconte-t-il sourire aux lèvres. Il vient pour rencontrer d’autres musulmans, assister à des conférences théologiques. Il y en a notamment sur l’éducation des enfants qui l’intéressent. "Beaucoup de monde parle au nom du prophète et à propos de l’islam, or c’est précisément le danger", déplore-t-il. Sonia vient aussi pour acheter des livres pour ses enfants. "Je veux voir ce qu’il y a de nouveaux dans ce domaine, pour transmettre la foi au petits, avec des supports adaptés", raconte la jeune femme venue avec deux amies et leurs ribambelles d’enfants. "Et puis, vous voyez c’est aussi une chouette sortie en famille". Penchée sur un stand de vêtements, Ismahen se choisit une tenue. "Je viens tous les ans", raconte-t-elle. "Pour les conférences, mais aussi pour le shopping, ici on trouve des tenues longues, avec des manches longues, des voiles ", raconte cette mère de famille. "Et puis ici, on se sent moins seuls, on est comme tout le monde", sourit-elle. "Au quotidien, les gens sont toujours heurtés par mon voile et je ne peux pas envoyer mes enfants à la cantine, car la viande n’est pas halal", se plaint la jeune femme qui travaille dans une boulangerie. Les organisateurs attendent environ 50 000 visiteurs, dont certains viennent de loin pour cette manifestation musulmane, la plus importante d’Europe, qui tient à la foi de la foire commerciale et de congrès politico-religieux. Au sein d’une communauté musulmane pressée par le gouvernement de se réorganiser face à la radicalisation jihadiste, l'UOIF profite également de cette vitrine pour consacrer son rapprochement avec la grande mosquée de Paris. Son recteur, Dalil Boubakeur, par ailleurs président du Conseil français du culte musulman (CFCM), doit en effet s’exprimer au Bourget samedi après-midi. Une rencontre bien utile pour l’UOIF", qui a pu paraître dans une mauvaise passe ces dernières semaines après plusieurs polémiques et les propos du Premier ministre Manuel Valls contre "l'influence" des Frères musulmans.

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